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Évangile

Les missions impossibles : une opportunité de rendre gloire à Dieu. | Evangile du 22 décembre

By 18 décembre, 2024décembre 21st, 2024No Comments


Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc 1,39-45

En ces jours-là, Marie se mit en route et se rendit avec empressement vers la région montagneuse, dans une ville de Judée.
Elle entra dans la maison de Zacharie et salua Élisabeth.
Or, quand Élisabeth entendit la salutation de Marie, l’enfant tressaillit en elle. Alors, Élisabeth fut remplie d’Esprit Saint,
et s’écria d’une voix forte : « Tu es bénie entre toutes les femmes, et le fruit de tes entrailles est béni.
D’où m’est-il donné que la mère de mon Seigneur vienne jusqu’à moi ?
Car, lorsque tes paroles de salutation sont parvenues à mes oreilles, l’enfant a tressailli d’allégresse en moi.
Heureuse celle qui a cru à l’accomplissement des paroles qui lui furent dites de la part du Seigneur. »

Les missions impossibles : une opportunité de rendre gloire à Dieu.

Luis CASASUS, Président des Missionnaires Identès

Rome, 22 Décembre 2024 | IV Dimanche de l’Avent.

Mi 5: 1-4; Heb 10: 5-10; Lc 1: 39-45

Il y a quelques semaines, je visitais notre mission à Chiang Mai, la deuxième ville de Thaïlande, juste après les terribles inondations qui ont détruit des maisons et des petites entreprises, prenant tout le monde par surprise, car les pluies de mousson ont commencé plus tôt que d’habitude. L’armée était encore en train de nettoyer certaines zones et de distribuer de l’eau potable. Sur le chemin du centre-ville, j’ai remarqué une petite fille de sept ans qui, en larmes, aidait ses parents à enlever la boue de ce qui restait de leur maison. Le lendemain, quand je suis repassé à cet endroit, cette même petite fille aidait ses voisins à nettoyer la boue… et le troisième jour, je l’ai vue dans la maison d’en face, en train de faire la même chose….

Aujourd’hui, lorsque l’Évangile nous rappelle la visite de Marie à sa cousine Élisabeth, j’évoque l’image de cette petite fille thaïlandaise. Marie était sans doute très jeune, mais elle s’est mise en route parce qu’elle a senti le souffle de l’Esprit Saint, le même qui pousse chacun de nous à faire le bien… mais elle a été vraiment obéissante, parce qu’elle était Immaculée. Dans sa vie, nous voyons comment nous pouvons être quand nous ne nous laissons pas emporter par l’arrogance et l’orgueil de nos jugements ou par la peur de nous mettre en route.

Dans tous les cas, l’Esprit Saint nous surprend, dépassant les attentes de ceux qui veulent faire le bien et de ceux qui vivent médiocrement. Son inspiration est absolument libre, imprévisible. Nous le voyons dans la première lecture, lorsque le prophète Michée annonce un « chef d’Israël » qui surgira de l’insignifiante ville de Bethléem, née d’Ephrata, une petite branche de la tribu de David. Sans aucun doute, tout le monde pensait qu’il s’agissait d’un roi puissant, capable de changer la situation désastreuse d’Israël, accablé par la corruption de ses dirigeants et les abus de tous ceux qui avaient une quelconque responsabilité, sans parler de la vie morale déplorable qui, à cette époque, 800 ans avant Jésus-Christ, avait détruit de nombreuses familles et la société tout entière.

Tout cela, exactement comme nous le voyons aujourd’hui, à cause de la folie de vouloir vivre sans Dieu. C’est ce que le pape Benoît XVI a dénoncé :

C’est l’oubli de Dieu lui-même qui plonge les sociétés humaines dans un relativisme qui engendre inévitablement la violence. Lorsque la possibilité pour chacun de se référer à une vérité objective est niée, le dialogue devient impossible et la violence, ouvertement déclarée ou dissimulée, devient la règle des relations humaines (7 DEC 2012).

Encore une fois, la Providence va au-delà de ce que nous croyons lire dans les signes et les prophéties, qui en réalité annonçaient la venue d’un Roi très différent, qui n’éliminerait pas la douleur et le mal du monde, mais qui montrerait à tous qu’il est toujours possible de vivre différemment, en présence de Yahvé, en accomplissant sa volonté et, pour cette raison, en étant capable de marcher avec l’espérance. C’est peut-être pour cette raison que le génial saint Augustin disait que la paix est tranquillitas ordinis, c’est-à-dire le calme que l’on obtient en étant fidèle à l’ordre voulu par Dieu.

Oui, le Christ vient avec la paix, que nous pouvons ressentir dans nos cœurs, malgré nos péchés et notre peu de foi, malgré la puissance du mal dans le monde. Et, de plus, cette paix peut être transmise, contrairement à la paix fragile et éphémère que donne parfois le monde. Elle nous rend capables de considérer tout être humain comme notre frère, ce qui ne peut être obtenu par des traités, des idéologies ou le contrôle des personnes et des nations. C’est un don, comme nous le rappelons à chaque eucharistie :

Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix. Je ne vous la donne pas comme le monde la donne. Ne vous inquiétez pas et ne vous laissez pas abattre (Jn 14, 27).

En effet, il ne s’agit pas d’une tactique ou d’une meilleure organisation ; il ne s’agit même pas d’un mode de vie, même si de tels efforts sont nécessaires. La paix n’est pas simplement quelque chose que nous construisons, ni un état ou une attitude de la personne, comme nous le dirait un psychologue bien intentionné. Le texte de Michée se termine aujourd’hui par ces mots : Il sera lui-même la paix.

—ooOoo—

Tout ce qui précède ne sont pas de belles phrases théologiques ou morale. Lorsqu’il y a un manque de paix entre les gens, il y a toujours quelqu’un qui s’est senti blessé, attaqué. Parfois récemment, parfois il y a longtemps ; parfois il verra de mauvaises intentions chez son voisin et parfois un simple manque de sensibilité. Mais sa réaction sera inévitablement une forme de colère ou un silence douloureux. Dans tous les cas, Dieu n’est pas présent, mais seulement le caractère des protagonistes.

Lorsqu’il y a un manque de paix dans une famille ou une communauté, il est fréquent d’entendre des phrases comme celles-ci de la part de ses membres :

– Ils ne m’informent jamais de rien.

– Ils ne s’intéressent pas à ma santé et à mes difficultés professionnelles.

– J’ai décidé de ne plus donner mon avis, ils ne m’écoutent jamais.

– Il vaut mieux ne pas parler pour éviter les problèmes.

… et d’autres. Bien qu’il y ait une part de vérité, l’essentiel est que, dans ces situations, notre regard sur Dieu disparaisse, notre enthousiasme à servir tout le monde, en oubliant le premier besoin de notre prochain : la paix, celle que le Christ a donnée en premier lieu lorsqu’il s’est présenté à ses disciples, surtout lorsque la peur les a saisis, comme au Cénacle :

Le soir de ce premier jour de la semaine, comme les disciples étaient réunis à huis clos par crainte des Juifs, Jésus entra et, se tenant au milieu d’eux, il dit :

La paix soit avec vous !

Après avoir dit cela, il leur montra ses mains et son côté. Quand les disciples virent le Seigneur, ils se réjouirent (Jn 20, 19-20).

La volonté de Marie d’aider Élisabeth est souvent soulignée dans sa visite, mais ce n’était peut-être pas le plus important. Elle n’était pas une experte, même si elle commençait à ressentir les effets de sa propre grossesse. Elle comprenait très bien que la paix commence par la présence, par notre intérêt et notre désir d’accompagner tous les efforts et les désirs de ceux qui nous sont proches. J’oserais le dire avec quelques vers :

Ce n’était pas si urgent, Marie.

D’ailleurs, Élisabeth avait à ses côtés

une équipe de jeunes filles très expertes

pour l’aider dans sa grossesse.

Tout allait bien à Ain Karim,

ses vignobles bienveillants… et ce miracle.

Mais tu t’es dépêchée

car il manquait le plus important

ta paix silencieuse… et cette étreinte.

Les choses n’ont pas été faciles ni confortables pour Marie, qui a dû subir l’incompréhension, fuir en Égypte, puis assister dans l’angoisse à la passion et la mort de son Fils. Mais la Providence choisit toujours des personnes inexpérimentées, ou qui ne sont pas au meilleur moment de leur vie, ou des pécheurs comme vous et moi, pour rendre visible la gloire du Père dans notre petitesse.

Nous ne devons pas penser que cette petitesse est due au fait évident que la plupart d’entre nous ne sont pas des génies, mais parce que notre foi est petite, notre fidélité incomplète et notre prière pas tout à fait continue. Dieu tient sa parole si nous nous approchons de l’autre en son nom, au nom de sa paix. Ce n’est pas de notre fait, comme le rappelle saint Paul à la personne qui vit en état de prière : Ne vous inquiétez de rien, mais en toute occasion, par la prière et la supplication, présentez à Dieu vos demandes et rendez-lui grâce. Et la paix de Dieu, qui surpasse toute intelligence, gardera vos cœurs et vos esprits dans le Christ Jésus (Ph 4, 6-7).

Aujourd’hui, dernier dimanche de l’Avent, nous nous souvenons que le Christ vient avec l’intention de demander notre coopération ; il ne veut rien faire seul. La réponse de Marie est toujours un « oui » aux projets de Dieu. Depuis son acceptation de la mission qui lui a été communiquée par l’archange Gabriel jusqu’à sa diligence à rendre visite à Élisabeth. Me voici, est la réponse à la question permanente de Dieu : Où es-tu ? Il ne s’agit pas de demander mes coordonnées, mais de connaître ma volonté de faire quelque chose en Son nom, qu’il s’agisse d’une idée de ma part, d’une indication d’un supérieur ou d’un état de santé difficile, d’un trouble émotionnel ou d’une incertitude.

Au Paradis, Adam a entendu cette question et s’est caché derrière un arbre. Il a eu peur d’être en présence de Dieu le Père. Au contraire, Abraham, Moïse, Jérémie et tous ceux que nous appelons les saints, répondent « Me voici ». Ce sont les paroles de Marie, qui se déclare servante du Seigneur.

Dieu ne nous appelle pas selon nos talents, il n’en a pas besoin. Ils sont un don que nous recevons de Lui. Il a besoin de nous, de toute notre personne, quand nous sommes heureux et quand nous souffrons. Comme le rappelait Moïse aux Israélites : Le Seigneur vous a aimés et vous a choisis, alors que vous n’étiez pas le peuple le plus nombreux, mais le plus petit de tous (Dt 7, 7).

Et de façon plus claire : N’est-ce pas là le fondement commun de toutes les Béatitudes ?

C’est ce qui explique le contenu central de la deuxième lecture. Il ne s’agit pas d’un changement d’habitudes liturgiques ou d’un mépris des rites, mais de la possibilité d’offrir continuellement à Dieu quelque chose de notre fragile existence : Voici que je suis venu pour faire ta volonté. Les autres résolutions, les autres intentions, bonnes ou mauvaises, peuvent changer, disparaître ou devenir des désirs impossibles, mais seul le désir d’être serviteur de Dieu peut donner une direction et un sens à chaque instant. Et sa lumière devient visible.

Puis-je illustrer mon propos par une vieille histoire ?

Un roi oriental d’un pays qui adorait le soleil voulait lui construire un temple. Il fit appel à trois architectes et demanda à chacun d’eux de lui fournir une maquette du temple.

Après plusieurs jours, ils revinrent pour présenter leurs modèles. Le premier prépara un temple en pierre magnifiquement sculpté. Le roi l’admira et appela le second. Le sien était en or pur, et les murs étaient polis et brunis jusqu’à ce qu’ils reflètent le soleil de tous les côtés. Le roi était ravi et l’architecte pensait avoir gagné le prix. Mais le troisième apporta son petit modèle et il s’avéra qu’il était tout en verre, de sorte que le soleil pouvait entrer partout et l’emplir spontanément de sa lumière et de sa gloire. 

Le roi dit : « Oh ! Voilà le vrai temple du soleil, son propre sanctuaire, qui lui permet d’entrer dans toutes les chambres, et qui n’a d’autre gloire que sa propre lumière parfaite.

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Dans les Sacrés Cœurs de Jésus, Marie et Joseph,

Luis CASASUS

Président